Rester tard le soir pour bien se faire voir par la hiérarchie, une bonne stratégie ?

04 novembre, 2019


télétravail présence au bureau

 

Un soir d’hiver, vous partez à 18h du bureau après une journée de travail bien remplie. Il est temps de partir, car après cette longue journée de travail la fatigue se fait sentir et demain matin vous aurez retrouvé l’énergie nécessaire pour avancer dans votre mission. De plus vous avez une vie en dehors du travail. Rester au bureau juste pour faire de la présence, à quoi bon… Vous êtes bien au-dessus de tout ça.

 

Pourtant en vous dirigeant vers la sortie vous croisez deux collègues à machine à café qui vous font des remarques car ils trouvent que vous partez trop tôt : « Tu travailles à la poste ? ». Ces deux collègues, comme tant d’autres, ont glandouillé toute la journée pour étaler leur journée de travail le plus possible. Au niveau des horaires, le chef arrive à 10h du matin et part à 20h du soir, donc pour se faire voir par la direction arriver tôt le matin ce n’est pas rentable, il vaut mieux arriver tard et partir tard dans cette boite.

 

Le culte de la présence au travail, ce fléau… Par peur du qu’en-dira-t-on de nombreux employés restent tard au bureau alors qu’ils ne font rien de productif.

 

Interview du sociologue Denis Monneuse pour savoir ce qu’il pense du présentéisme (extrait de Courrier Cadres)

 

Les salariés sont encore gênés à l’idée d’arriver les derniers au bureau, ou de partir en premier. Comment inverser ces tendances ?

 

Le présentéisme compétitif ou stratégique consiste en effet à arriver tôt le matin ou à rester tard le soir pour montrer à sa hiérarchie et à ses collègues son engagement au travail. Le meilleur moyen de lutter contre ce phénomène est de prendre conscience que le temps de travail est un faible indicateur de la performance. Une entreprise peut découpler le temps de travail et la rétribution. Par exemple, en proposant des rémunérations au mérite sur des critères de performance, de qualité, de partage de connaissances, etc.

 

Si l’entreprise est capable de mesurer finement la qualité du travail de ses salariés, elle pourra alors arrêter de se fier à leur seul temps de travail, c’est-à-dire aux apparences. L’exemplarité des managers est aussi importante. Si ces derniers s’autorisent à ne pas faire des amplitudes horaires trop importantes, cela envoie un signal à leurs équipes. Elles peuvent faire de même !

 

Pourquoi, selon vous, le télétravail est-il encore si peu démocratisé ?

 

Cela fait des années qu’on dit qu’il faudrait développer le télétravail ! Il y a traditionnellement deux freins. Un frein technique et un frein culturel. Aujourd’hui, un conducteur de train ne peut évidemment pas faire du télétravail. En revanche, le télétravail est devenu possible pour un grand nombre de métiers.

 

Le frein technique est de moins en moins fort. Reste le frein culturel. Les managers ont encore du mal à accepter de ne pas avoir tous les membres de leur équipe sous la main ou bien sous leurs yeux. Mais quand ces derniers se mettent eux-mêmes à pratiquer le télétravail, ils peuvent changer d’avis et voir les effets positifs de cette pratique. De même, si les salariés ont une rémunération à la performance, les télétravailleurs resteront productifs.

 

L’open-space est-il un lieu de nuisance ?

 

L’open-space ne veut pas dire grand-chose dans la mesure où ces espaces peuvent être extrêmement différents en matière de taille, de nombre de salariés, de cloisonnements, de disposition, etc. L’open-space a mauvaise réputation aujourd’hui car c’est avant tout une façon de réduire la taille des locaux en faisant travailler dans un espace un grand nombre de personnes.

 

Mais il est possible de faire des open-space de qualité en travaillant avec des experts de l’aménagement de bureaux et avec les salariés eux-mêmes pour que leur voix soit enfin prise en compte.